Ma rencontre avec Jean-Jacques de Pedretti

Mar 17, 2011 | Actualités | 0 commentaires

Le 9 mars dernier, j’ai rencontré Jean-Jacques de Pedretti, ancien ministre, Maire de Sarlat, chargé par le Président de la République d’une mission sur la clarification des compétences des départements et des régions et, notamment, de mener une réflexion sur les conditions d’élaboration des futurs schémas régionaux d’organisation des compétences et de mutualisation des services.

Après avoir rappelé le cadre de la loi du 16 décembre 2010 « de réforme des collectivités territoriales » et les attentes déçues des grandes villes et agglomérations face au statut de métropole “a minima“ finalement retenu par la loi, j’ai fait part à Jean-Jacques de Peretti du fort intérêt des grandes agglomérations pour la création de pôles métropolitains.

J’ai insisté sur le fait que, bien que non concerné directement par la clarification des compétences des régions et des départements, les grandes villes, leurs EPCI et leurs futurs pôles métropolitains seraient très attentifs à ses conséquences, tant en ce qui concerne les compétences elles-mêmes qu’en termes budgétaires et financiers.

Jean-Jacques de Peretti m’a indiqué que l’on pouvait s’attendre à presque autant de cas de schémas d’organisation des compétences et de mutualisation des services qu’il y a de régions. C’est pourquoi, il souhaite proposer, d’une part, un “modèle“ de schéma, suffisamment souple pour être facilement adaptable, fondé sur le recensement des bonnes pratiques qui s’avèrent nombreuses, d’autre part, d’anticiper les choses et de préconiser dans son rapport que les élus devancent le calendrier prévu, c’est-à-dire se saisissent de la question avant 2015 et même avant 2014. Ce rapport doit être rendu au président de la République fin juin, après le dépôt de premières conclusions dès la fin mars.

A cette occasion je souhaite revenir aujourd’hui sur les enjeux de cette «clarification des compétences» pour les grandes villes et leurs agglomérations.
La loi du 16 décembre 2010 dite «de réforme des collectivités territoriales», n’a pas apporté de changement notable en ce qui concerne les compétences des communes, lesquelles conservent ce que l’on appelle “la clause de compétence générale“.
Il n’en est pas de même pour les départements et les régions qui seront placés – à compter du 1er janvier 2015 – sous le régime de compétences d’attribution.
Ainsi, le titre IV de la loi porte-t-il essentiellement sur la clarification des compétences entre les départements et les régions, chacun devant agir à l’avenir « dans les domaines de compétence que la loi lui attribue ».
Mais, il convient d’être particulièrement attentif aux conséquences que ces nouvelles dispositions législatives peuvent entraîner pour les communes et leurs groupements intercommunaux, tout particulièrement en ce qui concerne :
– la question des compétences « départementales et régionales“ des métropoles ;
– la question de la prévention de répercussions éventuelles sur les pôles métropolitains ;
– la question du maintien de trois compétences partagées : tourisme, culture et sport ;
– la question du schéma d’organisation des compétences et de mutualisation des services et ses conséquences en matière de cumul de financements.

Les compétences “départementales et régionales“ des métropoles
Bien qu’actuellement on ne voit guère se profiler beaucoup de projets relatifs à la création de métropoles (nouveau statut d’EPCI ouvert seulement à des périmètres de plus de 500 000 habitants et à la communauté urbaine de Strasbourg), on ne peut savoir ce qu’il en sera dans l’avenir. C’est pourquoi il faut être attentif à permettre, comme le prévoit la loi du 16 décembre 2010, l’exercice par les métropoles des compétences des départements et des régions que la loi leur attribue de plein droit, à l’intérieur de leur périmètre :
– en lieu et place du département :
. transports scolaires ;
. gestion des routes classées dans le domaine public routier départemental ;
. zones d’activités et promotion à l’étranger du territoire et de ses activités économiques.
– en lieu et place de la région :
. promotion à l’étranger du territoire et de ses activités économiques.
Par ailleurs, et il s’agit là d’un amendement à l’initiative duquel se trouve l’Association des Maires de Grandes Villes de France et qui avait recueilli l’accord de l’As¬sociation des Maires de France et de l’Association des Communautés Urbaines de France, repris par le rapporteur à l’Assemblée nationale, Dominique Perben, il est prévu par la loi :
« La métropole est associée de plein droit à l’élaboration, la révision, et la modification des schémas et documents de planification en matière d’aménagement, de transports et d’environnement dont la liste est fixée par décret en Conseil d’Etat et qui relèvent de la compétence de l’Etat, d’une collectivité territoriale ou de leurs établissements publics, lorsque ces schémas et documents ont une incidence ou un impact sur le territoire de la métropole. »
Enfin, il convient de souligner que la loi prévoit également un certain nombre de compétences des départements et des régions que les métropoles pourront exercer par convention signée avec le département ou la région.

Prévenir les répercussions éventuelles sur les pôles métropolitains
Les pôles métropolitains, innovation de la loi du 16 décembre (article 20), seront, certes, créés par accord entre des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre, cependant il conviendra de veiller tout particulièrement à une certaine cohérence avec la nouvelle situation de compétences des départements et des régions et, tout particulièrement, que les projets de ces derniers – et/ou le schéma régional d’organisation des compétences et de mutualisation des services (voir ci-après) – ne viennent pas en contradiction avec les projets et les ambitions qui seront développés par les pôles métropolitains.
Ce d’autant plus que la loi prévoit que les projets de création de pôles métropolitains sont notifiés au conseil régional et aux conseils généraux concernés, qui devront se prononcer dans le délai de trois mois.

Les trois compétences qui resteront, de droit, partagées entre les trois niveaux de collectivités territoriales
L’article 73 de la loi précise que « les compétences en matière de tourisme, de culture et de sport sont partagées entre les communes, les départements et les régions. »
Il s’agit donc de faciliter l’exercice conjoint de ces compétences et de permettre la continuation du financement tripartite des actions concernées.
Il convient de souligner, en effet, que nombre de projets métropolitains ne pourraient plus voir le jour si les villes et leurs intercommunalités devaient en assurer, seules, le financement, d’autant plus que ces projets profitent, dans leur très grande majorité, aux habitants d’une aire beaucoup plus vaste que les limites communales et intercommunales.

Le « schéma d’organisation des compétences et de mutualisation des services »
Il convient de souligner que la création du schéma ne relève pas d’une obligation, mais qu’il s’agit d’une faculté: « le président du conseil régional et les présidents des conseils généraux des départements de la région peuvent élaborer conjointement dans les six mois qui suivent l’élection des conseillers territoriaux (c’est-à-dire après mars 2014) un projet de schéma d’organisation des compétences et de mutualisation des services » (article 75 de la loi).
Il faut, en la matière, insister sur le fait qu’alors que la décision échappe totalement aux maires et à la quasi-totalité des présidents d’intercommunalités (seules les métropoles présentes sur le territoire de la région devront être consultées de plein droit à l’occasion de l’élaboration, du suivi et de la révision du schéma), elle aura pour leurs collectivités de lourdes conséquences en matière de financements, puisque, selon l’article 77 de la loi :
– l’existence d’un schéma permettra le cumul de subventions d’investissement ou de fonctionnement accordées par un département et une région ;
– l’absence d’un schéma l’interdira pour les communes de plus de 3500 habitants et les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre de plus de 50000 habitants.
Rappelons qu’aux termes de la loi le schéma d’organisation des compétences et de mutualisation des services fixe :
– les délégations de compétences de la région aux départements et des départements à la région ;
– l’organisation des interventions financières respectives de la région et des départements en matière d’investissement et de fonctionnement des projets décidés ou subventionnés par une collectivité territoriale ou un groupement de collectivités territoriales ;
– les conditions d’organisation et de mutualisation des services.
Le schéma doit porter au moins sur les compétences relatives au développement économique, à la formation professionnelle, à la construction, à l’équipement et à l’entretien des collèges et des lycées, aux transports, aux infrastructures, voiries et réseaux, à l’aménagement des territoires ruraux et aux actions environnementales.
Il peut également concerner toute compétence exclusive ou partagée de la région et des départements. Il est approuvé par délibérations concordantes du conseil régional et de chacun des conseils généraux des départements de la région.