« Ma vie sur le fil »

Juin 8, 2014 | Actualités, Galerie de portraits | 0 commentaires

Reinhold Messner agit sur moi comme un aimant, avec le pôle qui attire (qui fascine?) et le pôle qui repousse (par son ego surdimensionné?).

Toujours est-il qu’il ne laisse pas indifférent.

Il est le premier à avoir accompli l’ascension du toit du monde, l’Everest (8848 mètres), sans l’aide de l’oxygène en 1978 avec Peter Habeler et le premier à y accéder en solitaire en 1980. Il a gravi 14 sommets de plus de 8000 mètres sans oxygène et franchi les points culminants des sept continents.

C’est devenu, par ses exploits et ses engagements, une véritable légende, toujours vivante!

Dès son adolescence, Reinhold Messner fait le choix d’une vie entièrement consacrée à l’alpinisme. Il grandit dans la région du Trentin-Haut-Adige au Nord de l’Italie (germanophone), gravit dès l’âge de 5 ans son premier sommet, passe sa jeunesse à arpenter les massifs alpins, avec notamment son frère Günther.  Passés la vingtaine, ils sont tous les deux considérés parmi les meilleurs grimpeurs d’Europe.

Pourvu de tous les dons (intelligence, résistance, courage, détermination) et grâce à un entrainement d’une rare opiniâtreté, il fera reculer dès les années 70 les limites de « l’extrême ».

Le 7ème degré est né avec lui.

1980: « Si j’arrive à m’en sortir vivant, je redescendrai, je renoncerai. Jamais plus de 8000 en solo ». Trois jours plus tard, sorti miraculeusement d’une crevasse, Reinhold Messner est pour la deuxième fois en deux ans au sommet de l’Everest. En solitaire. Sans oxygène. Par la face Nord. Il a vécu sa propre ascension dans le souvenir de Mallory et Irvine, entrés comme lui, en 1924, dans la légende de l’Himalaya.

Je repense, à cet instant, à l’intense émotion qui m’avait envahi, au camp de base de l’Everest où nous nous étions arrêtés sur la route du Cho Oyu. Je devinais l’itinéraire Messner et revivais en pensée l’épreuve inouïe qu’il avait surmontée dans cette ascension extraordinaire.

La montagne aura pourtant le dernier mot. Messner repart pour la troisième fois dans la même saison à l’assaut d’un nouveau 8000.

Et le 16 octobre 1986, en réussissant l’ascension du Lhotse, il devenait le premier homme à avoir gravi les quatorze 8000 du monde.

Que d’épreuves, de fatigues insensées, de confrontation avec le danger et la mort!

Mais la plus grande tragédie de sa vie restera gravée sur les flancs du Nangat Parba, en redescendant par le versant Diamir. Une polémique va faire rage en Allemagne: Reinhold, au sommet de la « montagne nue » a t-il sacrifié son jeune frère Günther, à ses ambitions? Il passera sa vie à expliquer la vérité comme Bonatti  l’a fait pour le K2 en son temps.

En 1995, il est élu en Italie, au Parlement européen. Sensible à la protection de l’environnement, il défend ces sujets avec force à Bruxelles. Aujourd’hui, son souci de transmettre et d’éduquer sur la montagne l’a mené à se consacrer à la réalisation d’un ensemble de musées de la montagne, les Messner Mountain Museum (MMM).

Au fond, je me retrouve dans beaucoup de ses valeurs et de ses aspirations. Son intelligence vive et l’assurance de ses convictions forgées sur le fil entre la vie et la mort m’ont séduit, contrairement à certains qui n’y ont vu que chance et arrogance…

J’ai lu la plupart des ouvrages écrits par Reinhold Messner. S’il fallait n’en citer que 4, chose bien difficile, je retiendrais:

Le 7ème degré

Les horizons vaincus (la face Nord de l’Everest en solo)

La montagne nue

Ma vie sur le fil.

Bonne lecture!