Michel Destot a dénoncé des propos malsains et inadmissibles qui vont conforter l’extrême droite

Fév 5, 2012 | Actualités, Dans les médias | 0 commentaires

Claude Guéant : « toutes les civilisations ne se valent pas ». Ces propos prononcés par le ministre de l’Intérieur lors d’un colloque organisé par l’association étudiante Uni, au cours duquel il a appelé à « protéger notre civilisation », ont suscité le tollé à gauche. Harlem Désir y a vu « la provocation pitoyable d’un ministre réduit à rabatteur de voix FN ». Claude Guéant « ne regrette rien » et accuse la gauche d’avoir sorti la phrase de son contexte.

La phrase qui fait polémique a été prononcée samedi par Claude Guéant durant un colloque organisé par l’association étudiante de droite Uni. Elle s’est aussitôt répandue sur internet, provoquant des réactions indignées. Elle a tout d’abord été rapportée au conditionnel, la réunion étant à huis clos, par Fréquence ESJ (frequenceesj.com), un site lié à l’Ecole supérieure de journalisme (ESJ) de Paris ; puis elle a été confirmée dans la soirée par l’entourage de l’intéressé. Au cours de cette intervention, Claude Guéant a appelé à « protéger notre civilisation », en assurant : « Contrairement à ce que dit l’idéologie relativiste de gauche, pour nous, toutes les civilisations ne se valent pas. Celles qui défendent l’humanité nous paraissent plus avancées que celles qui la nient », a-t-il argumenté, ajoutant : « celles qui défendent la liberté, l’égalité et la fraternité, nous paraissent supérieures à celles qui acceptent la tyrannie, la minorité des femmes, la haine sociale ou ethnique ».

L’entourage de Claude Guéant et le ministère de l’Intérieur se sont empressés d’apporter une explication de texte. « Cette phrase a été prononcée à l’occasion d’un discours absolument républicain dont tout l’enjeu était de condamner les civilisations qui ne respectent pas la liberté de conscience, la liberté d’expression et l’égalité entre les hommes et les femmes », a fait valoir l’entourage du ministre. Sur Twitter, Louis de Raguenel, chargé de la veille internet au ministère de l’Intérieur, a expliqué qu' »il s’agissait de condamner celles qui ne respectent pas la liberté de conscience, d’expression et l’égalité hommes/femmes ». Claude Guéant a lui affirmé, dimanche sur RTL, qu’il « ne regrette pas » ses propos. Seul regret alors? « Que certains à gauche continuent à extraire des petites phrases de leur contexte et enlèvent ainsi la dignité du débat démocratique ».

« Abject »

Directement visée dans les propos du ministre pour son « idéologie relativiste », la gauche a rapidement dénoncé les propos du ministre. Sur son compte twitter, Harlem Désir, numéro 2 du PS, y a vu « la provocation pitoyable d’un ministre réduit à rabatteur de voix FN. Une majorité en perdition électorale et morale ». « Retour en arrière de 3 siècles. Abject », a écrit sur le sien Cécile Duflot (EELV). Dans un communiqué, Michel Destot, député-maire de Grenoble et président du conseil national du PS, a dénoncé « des propos malsains et inadmissibles qui vont conforter l’extrême droite ». Egalement dans un communiqué, le Mouvement des jeunes socialistes (MJS) a « condamné les propos » de Claude Guéant en lui demandant « ce qu’il cherchait en s’enfermant dans son discours xénophobe et raciste ». Le ministre « se range dans la catégorie de ceux qui différencient et hiérarchisent les hommes, permettant le basculement vers un véritable racisme culturel », ont-ils ajouté. Ségolène Royal a dénoncé « un dérapage contrôlé et parfaitement volontaire » de Claude Guéant, et « des propos obscurantistes et dangereux ». SOS Racisme a dit, dans un communiqué, « espérer un démenti urgent » de ces propos. « Si ces derniers, très graves, avaient été bel et bien tenus par le ministre de l’Intérieur en fonction, ils marqueraient une nouvelle étape dans une dérive vers des extrêmes inacceptables, structurés notamment par des logiques d’infériorisation de l’Autre ».

A droite, le ministre de la Défense, Gérard Longuet, a répondu à la polémique dimanche matin sur RTL. La phrase incriminée, a déclaré le ministre, « est intéressante dans son contexte ». Et de détailler : « Dire que le respect de la personne, dire que le refus de la violence, dire que le refus de la peine de mort par exemple hiérarchisent des comportements, des cultures, des civilisations me paraît d’une banalité totale ». Pour lui, « si on ne peut même pas dire cela, c’est la censure à tous les étages et à tous les moments de la réflexion ». Pour sa part, le président de l’Uni, Olivier Vial, a expliqué : « Ce discours très général, très serein, posé et républicain a été prononcé dans une configuration de colloque, pas de meeting. Il n’avait aucune vocation à être polémique ». Selon lui, « la petite phrase a été totalement sortie de son contexte ».

Claude Guéant a déjà suscité la controverse sur des sujets connexes, déclarant notamment en avril que l’augmentation du nombre de fidèles musulmans posait « problème », ou, fin mai, que « les deux tiers des échecs scolaires, c’est l’échec d’enfants d’immigrés ». Cette nouvelle polémique à moins de 80 jours du premier tour de la présidentielle intervient alors que tous les sondages donnent Nicolas Sarkozy perdant face à son rival PS François Hollande. Elle survient aussi au moment où la candidate du FN, Marine Le Pen, créditée d’environ 20% d’intentions de vote, tire la sonnette d’alarme sur sa capacité à rassembler les 500 parrainages d’élus nécessaires pour se présenter à la présidentielle.