Déplacement au Cambodge (2)

Nov 11, 2015 | Actualités, International | 0 commentaires

Village_flottant_SIEM_REAP

Le village flottant de Siem Reap

C’est la deuxième fois que je me rends au Cambodge.

Je me souviens précisément de mon premier voyage, il y a une quinzaine d’années, à l’occasion d’une mission sur les ONG françaises, que je présidais au sein de la Commission des Affaires étrangères de l’Assemblée Nationale.

Phnom Penh abritait alors un nombre invraisemblable d’ONG de tous pays venant faire « leur marché humanitaire » dans un pays largement exsangue et sous administré. On ne savait plus bien qui dirigeait le pays, qui définissait les priorités, et qui finalement bénéficiait de la solidarité internationale.

Je me souviens particulièrement de l’état d’abandon dans lequel se retrouvaient les équipements sanitaires de la capitale. On y trouvait nombre de malades condamnés à mort, faute de soins.

Je revois encore l’image de ces tout jeunes enfants qui passaient leurs journées sur la décharge d’ordures ménagères de Phnom Penh, à la recherche de tout ce qui pourrait se monnayer dans les prélèvements des rebus urbains.

Beaucoup étaient issus de familles décimées par les Khmers rouges. Certains étaient tout simplement seuls dans la vie, essayant déjà de ne pas mourir à leur tour, et n’ayant comme seul réconfort que la présence à leurs côtés de leurs petits compagnons d’infortune.

J’étais revenu particulièrement bouleversé par ce que j’avais vu dans ce pays longtemps décrit comme l’un des plus accueillants du monde.

15 ans plus tard, aux côtés du Laos, du Vietnam et de la Thaïlande, qui n’ont pas été toujours des peuples amis, le Cambodge offre l’image d’un Sud-Est asiatique rasséréné, après les années d’horreur.

Atelier_tissage_soie

Atelier de tissage de la soie

Les Khmers rappellent qu’ils sont les enfants d’une brillante civilisation, vieille de plus de 1.200 ans, et que les Lumières finissent toujours par percer les cieux noirs de l’Enfer.

D’où le choix d’un séjour à Siem Reap pour visiter la 8ème merveille du monde, les temples d’Angkor, qui comptent sur 400km2 des dizaines d’édifices construits à partir de l’an 900. C’était une ville entière pensée en harmonie avec les lois du ciel et qui reste aujourd’hui un patrimoine d’exception, avec ses temples, ses sculptures, ses bas-reliefs, ses cours pavées et ses ruines dévorées  par la végétation. Et quand la lumière du matin ou du soir balaie les temples et les ruines d’Angkor Wat, chef d’œuvre de l’art khmer, on vit un moment de grande profondeur.

Avec le temple de Ta Prohm, on assiste à l’un des plus extraordinaires spectacles de la nature. D’immenses fromagers étendent leurs racines à travers les pierres, les soulevant et modifiant petit à petit la configuration originelle du temple.

Non loin de Siem Reap, le Lac Tonlé Sap nous offre ses villages flottants le long d’un chenal qui devient une véritable mer intérieure au moment des crues. L’UNESCO l’a classé réserve de Biosphère en 1997 en raison de l’incroyable diversité de son écosystème.

À l’ombre des temples d’Angkor, une communauté de tisserands s’est constituée sous la marque « Silk d’or », renouant avec son passé prestigieux en faisant revivre la splendeur de la soie du Cambodge, moins connue à l’étranger que celle de Chine, pourtant moins précieuse.

Et puis, avec les Chantiers Écoles – Les Artisans d’Angkor (initiés il y a une quinzaine d’années par l’Agence Française de Développement), on apprend aux jeunes Cambodgiens la sculpture sur pierre et sur bois, le travail de la laque, la polychromie, la patine… afin de faire revivre les anciennes traditions et de fournir un emploi à un millier de personnes dans des conditions d’économie sociale.

Ramassage_algues_près_temple_Angkor_Wat

Ramassage des algues près du temple d’Angkor Wat

Beaucoup de pays ont connu des périodes fastes alternant avec des phases plus éprouvantes. Le Cambodge n’a pas échappé à ces bouleversements souvent plus cruels qu’ailleurs. La sérénité légendaire du peuple khmer, son accueil toujours chaleureux et bienveillant, cachent les morsures de l’histoire, ces blessures encore vives des terribles épreuves subies par toutes les familles pendant la terreur de la dictature des Khmers rouges, sans compter les ressentiments dus aux interventions, invasions, dominations et « protections » françaises, thaïlandaises, américaines et vietnamiennes.

Bref, le pays ne laisse pas indifférent. Beaucoup en tombent amoureux.

Au-delà de la beauté des temples et des paysages de rizières, les hommes, les femmes et les enfants provoquent des émotions sans cesse renouvelées.

Et l’on se sent concerné par le sort de ce peuple encore meurtri par les épreuves subies et toujours largement victime de politiques autoritaires, corruptrices et inégalitaires.

C’est aussi pour tout cela qu’on aime ce pays et qu’on voudrait tant l’aider.