Intervention de Michel DESTOT relative au Projet de Loi de Finances 2010 action extérieure de l’Etat

Nov 3, 2009 | Actualités, International | 0 commentaires

Monsieur le Président, Monsieur le Ministre, Mes chers collègues,

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 Chacun conviendra que les défis que notre XXIème siècle doit relever sont essentiellement mondiaux:
– qu’il s’agisse de l’économie aujourd’hui globalisée mais mal maîtrisée, mal régulée au plan international
– qu’il s’agisse des inégalités Nord/Sud qui se creusent avec des flux migratoires dont la gestion reste chaotique, souvent inhumaine et finalement porteuse de danger pour l’humanité
– ou qu’il s’agisse, bien sûr, du réchauffement climatique pour lequel alternent, avec les prises de position des uns et des autres, espoir et désespoir. Ainsi pour les perspectives du prochain sommet de Copenhague.

 Au delà du débat sur le tribut que paie le Ministère des Affaires Etrangères et Européennes à la RGPP, il est permis de s’interroger sur l’avenir du réseau diplomatique de notre pays. Son universalité et sa pérennité pourraient être menacées pour deux raisons que je souhaite évoquer, succinctement, dans les quelques minutes qui me sont imparties.

Dans le domaine économique, tout d’abord, il serait opportun, à l’heure de la globalisation, qu’il y ait une action plus concertée entre le Ministre des Affaires Etrangères et Européennes et le Ministre des Finances. Le déficit du commerce extérieur est aujourd’hui abyssal (55 milliards en 2008!).

Il est temps de soutenir notre politique commerciale extérieure, vous en conviendrez!
Comment dissocier affaires extérieures et affaires économiques tant ces questions sont liées?
Même l’espionnage est aujourd’hui devenu essentiellement économique. Et puis, trop souvent, nos politiques sectorielles conduisent à des résultats contradictoires: politique commerciale contre politique de développement , ou contre respect des droits de l’homme, ou encore contre politique environnementale.
Nous le savons, il y a dans nos représentations à l’étranger une certaine culture qui pousse à se tourner vers la politique, matière noble qui relève de la chancellerie, et à délaisser le reste.
Et bien introduisons davantage de diversité dans les profils, dans la formation de nos ambassadeurs aux questions commerciales. Multiplions les passerelles entre postes diplomatiques, consulaires et économiques, à l’instar de ce que font les Allemands et les Américains.
A l’heure de la globalisation, ce budget risque d’ailleurs de marquer un nouveau recul de la France au plan extérieur, avec une perte de 255 emplois et plus préoccupant encore avec un budget qui seul, à priori, va perdre des effectifs de catégorie A.
Et puis, faisant écho à la vive inquiétude de notre rapporteure Geneviève Collot concernant la baisse de 7,5 % de l’enveloppe ouverte sur l’action sociale, je veux vous redire, monsieur le Ministre, que ce sont les expatriés les plus fragiles qui vont être les principales victimes de ces économies budgétaires, et ce alors même que les sommes en jeu sont faibles au regard du budget de l’Etat et que le contexte de crise justifiait à lui seul largement le maintien du niveau des aides actuelles, voire même leur augmentation.
Quant au réseau culturel de la france à l’étranger, il doit venir en appui aussi de l’action économique extérieure de notre pays.
Ne doit-on pas préconiser en ce sens le développement de ressources propres du réseau, avec recherche déterminée, professionnelle, de mécenat d’entreprises, d’aides des collectivités territoriales engagées dans des coopérations décentralisées actives et bien sûr de l’Union Européenne?
S’agissant des questions migratoires, en second lieu, la quasi totalité du pouvoir politique a été transféré au Ministère de l’Immigration.
Or permettez-moi de dire ici que l’identité nationale, sujet en vogue, c’est aussi le regard que l’extérieur porte sur notre pays. La position dure adoptée par le Ministre Eric Besson a, c’est clair, des répercussions négatives sur l’image de notre pays et cela nuit à notre attractivité politique, économique et ethnique.
Dans les crédits 2010 de votre département, que signifie la diminution des bourses aux élèves étrangers ?
Comme l’a toujours très bien expliqué ma collègue Pascale Crozon, cette politique visant à rendre notre territoire plus difficilement accessible aux étrangers va complètement à l’envers de l’évolution de la société française qui elle même est de plus en plus métissée et multiculturelle.
La nouvelle politique des flux migratoires de la France représente un frein pour l’influence de notre pays à l’étranger comme pour l’attractivité de nos territoires. Et ce malgré les efforts déployés par les collectivités locales pour accueillir les étudiants étrangers, notamment les meilleurs d’entre eux, quelques soient les pays d’origine, et pour favoriser les échanges.
Pour citer l’exemple que je connais le mieux, je suis fier que Grenoble soit reconnue pour sa politique d’accueil des étudiants palestiniens comme pour le succès au fil des ans de sa cité scolaire internationale (collège et lycée) avec ses enseignements en anglais, allemand, italien, espagnol, brésilien et arabe.
Cette politique a grandement aidé notre attractivité économique. Notre pôle de compétitivité y a gagné. De nouvelles entreprises internationales y ont développé des activités importantes créant ainsi autant d’emplois précieux!

Monsieur le Ministre, mes chers collègues,
La France n’a jamais été aussi grande, aussi forte, aussi respectée que quand elle s’est montrée accueillante, généreuse.
Le repli sur soi identitaire est une impasse.
A l’heure de la mondialisation, sachons montrer la voie, celle d’un pays aux couleurs du monde.
Notre politique étrangère et européenne doit s’inscrire dans cette logique.
C’est notre histoire, c’est l’avenir de l’humanité.